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WINIFRED GREENWOOD



Me voici revenue avec Winifred Greenwood au temps des hardies pionnières de la pellicule. Et Winifred fut peut-être la plus hardie, la plus combattante de toutes. Car non seulement elle n'était pas sanctifiée par le sacro-saint Broadway mais...Elle n'était pas jolie. Il n'y aurait jamais de millionnaires cotés en bourse pour lui envoyer des tombereaux d'orchidées où se cacheraient des rivières de diamants. Personne se se tuera d'une balle au coeur devant sa photo. Ca se saurait.

Pour Winifred il faudra travailler dur dans un monde d'hommes et de poupées de porcelaine enrubannées. Son histoire et sa réussite sont d'autant plus exemplaires en ces jours du XXIème siècle où le féminisme n'est plus un combat mais une manière, aussi, de geindre.

Winifred Greenwood est ce que l'on appelle une "enfant de la balle". A sa naissance le 1 janvier 1885, sa mère est une artiste. Une comédienne qui mène la vie rude et chichement payée des acteurs en tournée.

Winifred fera donc des débuts très improvisés dans les bras de sa maman. On avait besoin d'un bambin pour une pièce. Winifred fut catapultée sur scène. Elle avait trois ans et trouva l'expérience  particulièrement réjouissante.

Une vocation était née. Winifred jouera avec sa maman adorée jusqu'au décès de celle-ci en 1905.

L'orpheline a 20 ans, elle reste seule, elle n'est pas jolie, elle n'a jamais dit un seul mot à propos de son père. Faute d'un physique qui ouvre les portes, Winifred va les défoncer à coup d'audace, de culot et de talent. Car elle sait tout faire.

Pensez donc! 20 ans d'âge et 17 ans d'expérience!

Elle chante, danse, tirerait des larmes d'un fauteuil et ferait rire un tabouret.

Elle a la sagesse tout à fait inédite de jouer de son physique ingrat, n'essayant jamais de dissimuler son invraisemblable nez sous de délicates voilettes ni son imposante carrure sous l'hermine et le satin. Très vite elle s'impose en marâtre, en sorcière, en fermière, en femme habillée en homme pour aller en découdre à la guerre ou chevaucher de furieuses motocyclettes.

Il faudra attendre Elizabeth Taylor pour trouver une autre star ayant passé autant de temps qu'elle à l'hôpital!

Winifred paie de sa personne...Et fort cher!

Mais en attendant ses exploits filmés qui feront d'elle la star de plus de 200 films, il faut que l'on invente le cinéma.

Et Winifred sera une des premières à y croire sans jamais douter. Dès qu'elle en aura les moyens, en 1909 ,elle créera sa propre société de production au Texas.  Cadre idéal pour les grandes épopées aventureuses, genre où elle excelle. En 1911, elle est déjà suffisamment célèbre pour qu'une autre société de production, nettement plus importante que la sienne la sollicite.

Hollywood n'existe pas encore.

La Selig est à Chicago. Winifred est née à New-York, l'offre chicagolaise est presque une invitation a rentrer à la maison. Elle accepte une offre qui ne se refuse pas.

Et puis Winifred a d'autres raisons d'accepter une invitation à l'autre bout du pays. Mal mariée, elle fait son baluchon en catimini et se sauve avec ses deux enfants, Little Queen et Alonzo, sans demander son reste. L'affaire fera un intéressant scandale qui devancera la fuyarde à Chicago et l'accueillera à sa descente du train.

La scandaleuse débarque! Rentrez vos gosses, brandissez vos bibles.


Femme seule, saltimbanque avec deux enfants ayant abandonné son mari tel une bouse sur un chemin creux avant le première guerre mondiale, l'affaire est d'importance et ne manque pas d'audace. A peine si Winifred n'est pas une incarnation de l'antéchrist vouée à ébranler les valeurs sociales et religieuses de la nation.

Elle se fichera de l'opinion publique comme d'une guigne, mettra ses deux enfants à l'internat. Non sans aller les chercher quand elle a, à son tour, besoin d'un enfant pour un film.

Ne joue elle pas dans "Le Magicien d'Oz" et "Les Deux Orphelines"?

Ne joue elle pas la tante de Cendrillon?

En 1913, débarrassée de son mari par avocats interposés, elle quitte la Selig et retraverse le pays pour une autre société de production cette fois basée à Santa Barbara. Sa vie privée n'est, une fois encore, pas étrangère à sa décision. Winifred a un nouvel homme dans sa vie qu'elle épousera l'année suivante en 1914. Le nouvel élu est Georges Field. Le couple s'est rencontré sous l'oeil des caméras à manivelle. Georges et Winifred ont été partenaires à l'écran mais l'acteur est surtout tenté par la mise en scène. C'est ce qui décide le couple à gagner la Californie.

Une période cruciale. La guerre éclate en Europe. Georges ne partira pas au combat. Il est tuberculeux. Winifred, elle, est hospitalisée après de nouvelles malencontreuses cascades. L'actrice Charlotte Burton commentera un jour: "Winifred et moi étions sous contrat avec le même studio. La moitié des films que j'ai tournés étaient des films destinés à Winifred qu'elle n'a pas pu faire car elle était hospitalisée en pièces détachées!" La tuberculose emportera Georges Field en 1925. Winifred bien que supposée divorcée depuis 1918 se déclarera sa veuve et ne se remariera jamais.

Sa carrière n'allait cesser de gagner en prestige et c'est pour une somme absolument mirobolante que la Paramount s'offrira ses services. Pourtant, à l'heure de cet ultime contrat, la carrière de Winifred avait, insensiblement commencé à marquer le pas.

Au prestige intact et à l'admiration des critiques, répondaient des rôles de moins en moins importants.

Depuis 1921 l'actrice était moins présente, certes mais le cinéma avait beaucoup évolué. Il fallait maintenant six semaines pour un film. Aux heures les plus chaudes de sa gloire, on tournait un film en un jour. A partir de 1921 où elle tourne encore cinq films, son rythme ralentit. A peine tourne-elle un film par an, parfois aucun. Elle-même se prétend "retirée" puis réapparaît en 1927, histoire sans doute de voir à quoi ressemble une superproduction biblique de Cecil B. DeMille.

L'actrice alors, prétexta l'apparition du micro pour se retirer des écrans la tête haute. Peu crurent en son excuse. Elle qui avait été de toutes les comédies musicales, qui avait jouer tous les rôles sur scène Pouvait-elle s'exprimer comme un perroquet aviné sur les écrans? 

Ou simplement parce qu'après 40 ans de carrière et au moins autant de fractures la fatigue était là?

Winifred se retira donc et s'installa dans un très confortable anonymat. Elle refit un ultime passage fugace en 1936, histoire cette fois, de voir de près une de ces comédies musicales qui enchantaient un monde en crise.

On apprenait sa fin le 23 novembre 1961. Elle n'avait que 76 ans, c'est peu pour une telle force de la nature. Il y avait pourtant plusieurs années que sa vie se résumait en allers-retours entre la maison de retraite et l'hôpital.

Celine Colassin.


QUE VOIR?

1910: The Wonderful Wizard of Oz: Avec Bebe Daniels

1911: His Better Self: Avec William Stowell et Lillian Leighton

1911: A Novel Experiment: Avec Thomas Carrigan et Adrienne Kroel

1911: Brown of Harvard: Avec Lillian Leighton

1911: Getting Married : Avec Kathlyn Williams et Charles Clary

1911: The Two Orphans: Avec Kathlyn Williams et Thomas Carrigan

1912: The Other Woman: Avec Charles Clary et Lillian Leighton

1912: Cinderella : Avec Mabel Taliaferro

1912: An International Romance: Avec Frank Weed et Lillian Leighton

1913: Dixieland: Avec Edith Johnson

1913: Pauline Cushman, the Federal Spy: Avec Charles Clary

1913: Belle Boyd, a Confederate Spy: Avec Charles Clary

1913: A Daughter of the Confederacy: William Stowell

1913: The Making of a Woman: Avec George Field

1913: Fate's Round-Up: Avec George Field

1914: Like Father, Like Son: Avec George Field

1914: Business Versus Love: Avec Edward Coxen

1914: The Final Impulse: Avec George Field, Charlotte Burton et Edward Coxen

1915: Restitution: Avec George Field, Charlotte Burton et Edward Coxen

1915: The Problem: Avec Edward Coxen et Charlotte Burton

1915: The Zaca Lake Mystery: Avec George Field et Edward Coxen

1915: Out of the Ashes: Avec George Field et Edward Coxen

1916: In the Shuffle: Avec George Field et Edward Coxen

1917: The Alien Blood: Avec Clifford Grey

1918: Come again, Smith: Avec Loïs Wilson et J.Warren Kerrigan

1919: The Lottery Man: Avec Lila Lee, Sylvia Haston et Wallace Reid

1919: Men, Women, and Money: Avec Ethel Clayton et Zasu Pitts

1926: The Flame of the Yukon: Avec Seena Owen et Arnold Grey

1927: The King of Kings: Avec Dorothy Cumming et H.B. Warner

1936: The Music Goes 'Round: Avec Rochelle Hudson

 

 

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